Les salariés en télétravail peuvent-ils être privés de titres-restaurant au motif qu’ils ne sont pas physiquement présents dans l’entreprise, sans que cela ne constitue une rupture d’égalité de traitement ?
Cass. Soc. 8 octobre 2025, n°24-15.373
Un directeur commercial saisit la juridiction prud’homale afin d’obtenir le paiement de la contribution patronale due sur les titres-restaurant dont il n’a pas bénéficié pendant ses périodes de télétravail entre mars 2020 et mars 2022, soit pendant la période de télétravail généralisé due à la pandémie de COVID-19.
Le conseil de prud’hommes, aux termes d’une décision rendue en dernier ressort, fait droit à sa demande et condamne l’employeur au versement du rappel de salaire correspondant.
L’employeur se pourvoit en cassation, soutenant qu’il existerait une différence de situation entre les salariés en télétravail et ceux travaillant sur site, justifiant ainsi une différence de traitement.
Selon lui, le salarié en télétravail ne supporte aucun surcoût lié à la restauration puisqu’il déjeune à domicile, contrairement aux salariés présents sur site, qui n’ont pas accès à un service de restauration d’entreprise et doivent donc se restaurer à l’extérieur.
La Cour de cassation rejette le pourvoi et met ainsi fin aux divergences jurisprudentielles. Elle rappelle que l’employeur ne peut refuser un avantage aux salariés au seul motif qu’ils exercent leur activité en télétravail, dès lors que ces derniers se trouvent dans une situation comparable à celle des salariés travaillant sur site pour l’accès à cet avantage.
L’action en nullité d’une transaction mettant fin à tout litige relève-t-elle de la prescription biennale applicable à toute action relative à l’exécution du contrat de travail ?
Cass. Soc. 8 octobre 2025, n°23-23.501
Une salariée a alerté les représentants du personnel sur la dégradation de ses conditions de travail et, par conséquent, de sa santé mentale. Elle a ensuite été placée en arrêt maladie et hospitalisée pour un syndrome dépressif entre 2013 et 2014.
Le 29 mai 2015, elle conclut avec son employeur un protocole transactionnel ayant pour objet de réparer « le préjudice professionnel, psychologique et moral se rapportant aux conditions de travail ». Les parties, notamment la salariée, se déclarent remplies de l’intégralité de leurs droits.
Le 8 juin 2018, la salariée saisit le conseil de prud’homme d’une demande de nullité de la transaction conclue invoquant son état de faiblesse psychologique au moment de la signature, et sollicite donc le paiement de dommages et intérêts pour harcèlement moral, manquement à l’obligation de sécurité et exécution déloyale du contrat de travail.
Le conseil de prud’hommes fait droit à ses demandes de dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de sécurité et exécution déloyale du contrat, mais la condamne à restituer la somme perçue dans le cadre de la transaction.
La salariée interjette appel, sollicitant l’annulation de la transaction et la réévaluation de la recevabilité de sa demande de nullité.
La cour d’appel déclare son action prescrite, considérant qu’elle relevait de la prescription biennale applicable aux actions relatives à l’exécution du contrat de travail (article L.1471-1 du Code du travail). Elle la déboute de l’ensemble de ses demandes indemnitaires.
La Cour de cassation casse l’arrêt d’appel. Elle rappelle que l’action en nullité d’une transaction mettant fin à un litige relatif à l’exécution ou à la rupture du contrat de travail relève de la prescription quinquennale des actions personnelles prévue à l’article 2224 du Code civil. En conséquence, la demande de la salariée n’était pas prescrite.
Une entreprise dépourvue de section syndicale est-elle tenue d’établir un plan d’action en matière d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, à défaut d’accord collectif, sous peine de pénalité financière ?
Conseil d’État, 1er octobre 2025, n°495549
L’Administration a infligé une pénalité financière à une entreprise de plus de 50 salariés, cette dernière n’ayant ni conclu d’accord collectif ni établi de plan d’action sur l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.
L’entreprise a contesté cette décision et demandé aux juges du fond d’annuler la pénalité, ou à titre subsidiaire, d’en réduire le montant.
Elle soutenait que l’obligation de négocier un accord ou d’élaborer un plan d’action ne lui était pas applicable, faute de section syndicale dans l’entreprise. Elle faisait également valoir qu’ayant présenté à la DIRECCTE (devenue DREETS) un plan d’action régularisé, la pénalité devait être annulée, ou à tout le moins réduite.
Après le rejet de ses requêtes par le tribunal administratif puis par la cour administrative d’appel, l’entreprise s’est pourvue en cassation devant le Conseil d’État.
Le Conseil d’État rappelle que l’obligation de mettre en place un plan d’action, à défaut d’accord collectif, s’impose également aux entreprises dépourvues de section syndicale. À défaut, celles-ci s’exposent à une pénalité à la charge de l’employeur.
Il précise par ailleurs qu’il appartient à l’Administration de vérifier que l’accord ou le plan d’action comporte bien l’ensemble des mesures obligatoires, sans en apprécier l’opportunité ou la pertinence.
En l’espèce, le Conseil d’État relève que les plans d’action présentés par l’entreprise contenaient bien les mesures attendues. En jugeant le contraire, la Cour administrative d’appel a dénaturé les pièces du dossier. La décision de la Cour administrative d’appel est donc annulée pour que les juges administratifs prennent une nouvelle décision quant au sort de la pénalité en tenant compte du plan d’action conforme.
Le rapport parlementaire présenté le 15 octobre dernier à l’Assemblée nationale formule 35 recommandations pour réformer les congés parentaux, sujet récent de débat public, aux fins d’améliorer l’égalité parentale et la conciliation entre la vie familiale et la vie professionnelle mais également pour prévenir les situations de discrimination, notamment pour les femmes, pendant ou après la grossesse.
Les principales recommandations sont :
Dans le contentieux de la sécurité sociale, l’absence de décision de la commission de recours amiable (CRA) ne fait pas obstacle à la recevabilité du recours contentieux devant le juge, dès lors qu’une décision au moins implicite de rejet intervient avant la date du jugement.
Cass. 2ème civ., 25 septembre 2025, n°24-14.447
La différence d’assiette de cotisations d’assurance maladie, constituée des revenus fiscaux de référence pour les personnes résidant en France et travaillant en Suisse, et des revenus d’activité pour les personnes travaillant et résidant en France, ne porte pas atteinte au principe d’égalité de traitement et à celui de libre circulation des travailleurs ou au principe d’unicité d’affiliation au régime de l’assurance maladie.
Cette différence de traitement s’explique par une différence de situation objective et a pour but « d’assurer la participation effective [des travailleurs frontaliers] au financement du régime français d’assurance maladie auquel elles sont affiliées ».
Cass. 2ème civ., 25 septembre 2025, n°22-24.634
Les établissements nouvellement créés, quel que soit leur effectif ou celui de l’entreprise dont ils relèvent, bénéficient d’une cotisation AT/MP au taux net collectif durant les trois premières années suivant la création. N’est pas considéré comme un établissement nouvellement créé l’établissement issu d’un précédent établissement, exerçant une activité similaire et ayant repris les mêmes moyens de production et au moins la moitié du personnel.
Néanmoins lorsque la cessation de l’activité principale de la société reprise justifie l’application d’un nouveau code de risque à la société repreneuse, l’établissement doit être considéré comme nouvellement créé.
Cass. 2ème civ 25 septembre 2025, n°23-12.578
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