La restitution du matériel lié aux fonctions du salarié peut-elle constituer une manifestation non équivoque de la volonté de l’employeur de rompre le contrat ?
Cass. soc., 11 juin 2025 (n°23-21.819)
Un salarié, licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement, conteste la régularité de la rupture en faisant valoir qu’il aurait été licencié oralement par son employeur, avant même la notification écrite.
Devant la cour d’appel, il soutenait que l’employeur avait exigé la restitution de son véhicule de fonction, de ses clefs et badges d’accès, ainsi que des dossiers dont il avait la charge, traduisant selon lui une volonté non équivoque de mettre fin à la relation contractuelle.
La cour d’appel rejette toutefois cette analyse. Elle retient d’une part que le salarié ne démontre pas avoir été privé de ses accès informatiques et à sa messagerie professionnelle. D’autre part, elle souligne qu’il s’était lui-même présenté, dans un courriel postérieur aux faits allégués, comme « directeur d’exploitation encore à ce jour », ce qui, selon elle, est incompatible avec l’existence d’un licenciement verbal déjà prononcé.
La chambre sociale casse l’arrêt. Elle rappelle que la cour d’appel avait elle-même constaté que l’employeur avait exigé du salarié, avant l’envoi de la lettre de licenciement, la restitution de l’ensemble des outils nécessaires à l’exercice de ses fonctions : véhicule de fonction, badges, clefs, et dossiers.
Or, pour la Haute juridiction, cette demande unilatérale, émanant de l’employeur, traduit une volonté claire et non équivoque de mettre fin à la relation contractuelle. En procédant à cette récupération généralisée des moyens de travail, l’employeur manifeste de manière irrévocable sa décision de rompre le contrat de travail.
La Cour adopte ici une approche factuelle et pragmatique : peu importe que le salarié ait conservé ses accès informatiques ou qu’il se soit présenté sous son ancien titre dans un courriel. Ce qui importe, c’est l’intention manifeste de l’employeur, traduite par des actes concrets et significatifs.
La solution aurait pu être différente si la restitution du matériel s’était limitée aux seuls éléments strictement professionnels. La jurisprudence admet en effet que l’employeur peut demander à un salarié en arrêt de travail de restituer des documents ou outils indispensables à l’activité de l’entreprise, dès lors que cela n’équivaut pas à lui imposer un travail. S’agissant du véhicule de fonction, sa restitution peut être exigée s’il est réservé à un usage professionnel. En revanche, lorsqu’un usage privé est autorisé, l’employeur ne peut en priver le salarié sans contrepartie. Dans tous les cas, une telle demande doit s’accompagner de précautions, notamment en précisant par écrit son caractère temporaire afin d’éviter toute requalification en rupture anticipée du contrat.
Le licenciement prononcé après l’homologation d’une rupture conventionnelle prive-t-il le salarié du bénéfice de l’indemnité convenue ?
Cass. soc., 25 juin 2025 (n°24-12.096)
Le 15 janvier 2018, un directeur commercial conclut avec son employeur une convention de rupture conventionnelle. Celle-ci prévoit une date de rupture fixée au 30 juin suivant, ainsi que le versement d’une indemnité spécifique de 68 000 €. La convention est régulièrement homologuée.
Toutefois, postérieurement à cette homologation, l’employeur découvre des faits de harcèlement sexuel imputables au salarié. Il engage alors une procédure disciplinaire et prononce, avant le 30 juin, un licenciement pour faute grave. Sur ce fondement, il refuse de verser l’indemnité convenue au titre de la rupture conventionnelle, considérant que le contrat a été rompu par le licenciement, avant la date d’effet convenue.
Le salarié saisit alors le conseil de prud’hommes en vue d’obtenir le paiement de cette somme.
La cour d’appel déboute le salarié. Elle estime que le contrat ayant été rompu par le licenciement avant la date convenue dans la convention, cette dernière est privée d’effet. Selon les juges du fond, la rupture conventionnelle ne peut donc plus produire ses conséquences, notamment pécuniaires.
La Cour de cassation casse l’arrêt d’appel. Elle rappelle qu’en l’absence de rétractation, une convention de rupture produit ses effets dès son homologation.
Elle admet que l’employeur peut, entre l’expiration du délai de rétractation et la date de rupture convenue, licencier le salarié pour des faits fautifs survenus ou révélés durant cette période. Toutefois, ce licenciement ne remet pas en cause la validité de la convention ni l’existence de la créance indemnitaire née de l’accord.
La Cour précise en effet que le droit à l’indemnité de rupture naît au jour de l’homologation, même si son exigibilité est différée à la date fixée pour la rupture effective. L’employeur reste donc tenu de la verser, nonobstant la rupture anticipée du contrat par licenciement.
Cette décision s’inscrit dans le prolongement de la jurisprudence antérieure, selon laquelle dans le cas d’un décès du salarié survenu après l’homologation mais avant la date convenue de rupture, la créance d’indemnité restait acquise, car née dès l’homologation (Cass. soc., 11 mai 2022, n° 20-21.103).
L’arrêt du 25 juin 2025 confirme ainsi que l’homologation rend la convention irrévocable, sauf accord des parties ou circonstances exceptionnelles. Le contrat peut certes être rompu par d’autres modes (licenciement pour faute grave, décès…), mais la créance issue de la convention n’est pas anéantie pour autant.
Un syndicat ou un CSE peut-il agir en justice pour contester une exclusion des télétravailleurs du bénéfice des titres-restaurant, au nom de l’égalité de traitement ou de ses prérogatives institutionnelles ?
Cass. Soc., 4 juin 2025, n°23-21.051
Cass. Soc., 4 juin 2025, n°23-22.856
Dans deux arrêts rendus le 4 juin 2025, la chambre sociale de la Cour de cassation précise les limites de l’intérêt à agir respectivement des syndicats et des comités sociaux et économiques (CSE) en matière de différenciation de traitement entre salariés en télétravail et en présentiel, s’agissant de l’attribution de titres-restaurant.
Dans les deux affaires, des accords collectifs avaient exclu les télétravailleurs du bénéfice des titres-restaurant. Cette exclusion, confirmée par des textes ultérieurs, a conduit plusieurs syndicats et CSE à saisir le juge afin d’en obtenir l’annulation, invoquant pour les uns une atteinte à l’intérêt collectif de la profession, pour les autres une atteinte aux prérogatives du CSE.
La Cour de cassation confirme l’irrecevabilité des actions engagées par les syndicats. Elle rappelle que ceux-ci ne peuvent, au nom de l’intérêt collectif de la profession, solliciter la régularisation individuelle de la situation de plusieurs salariés. Peu importe que les syndicats ne réclament pas expressément le paiement de sommes à des salariés nommément désignés : en demandant que soit mis fin à l’exclusion des télétravailleurs du dispositif de titres-restaurant, ils poursuivent en réalité un objectif relevant de la seule liberté d’action individuelle des salariés concernés.
L’action du CSE est également déclarée irrecevable. La Cour relève que le CSE n’était ni partie prenante aux accords litigieux, ni chargé de la gestion ou de l’émission des titres-restaurant, ni même victime d’une irrégularité procédurale relative à une consultation obligatoire. Dans la seconde affaire, la Cour ajoute que la mesure contestée résultait d’un accord collectif de groupe, de sorte que le CSE d’établissement n’était pas recevable à agir seul.
Dans le même sens, la cour d’appel de Versailles a jugé, dans un arrêt du 10 avril 2025, que les demandes d’un syndicat portant sur le paiement de rappels de congés payés acquis pendant des arrêts maladie supposent l’examen de situations individuelles, et ne relèvent dès lors pas de la défense de l’intérêt collectif (CA Versailles, ch. soc. 4.2, 10 avril 2025, n° 24/01430).
Ces décisions, qui marquent une lecture stricte de l’intérêt à agir des syndicats et des CSE, peuvent s’expliquer à la lumière des évolutions récentes du droit des actions collectives. Depuis la loi du 30 avril 2025 d’adaptation au droit de l’Union européenne (dite loi "Daddue"), l’action de groupe en droit du travail connaît en effet un tournant majeur.
Son article 16 a levé plusieurs restrictions antérieures, en élargissant considérablement le champ de l’action de groupe ouverte aux organisations syndicales. Celles-ci peuvent désormais agir contre tout manquement de l’employeur, et non plus seulement en matière de discrimination ou de données personnelles.
Il n’est donc pas surprenant que la Cour de cassation veille, par ailleurs, à cantonner l’action syndicale de droit commun à sa vocation initiale, sans en faire un moyen détourné d’agir collectivement à la place de l’action de groupe désormais prévue par la loi.
Depuis le 2 juillet 2025, les employeurs sont tenus de mettre en place de nouvelles mesures de prévention à destination des salariés exposés à de fortes chaleurs. Cela inclut l’aménagement des postes de travail, la mise à disposition de ventilateurs ou dispositifs équivalents, un accès facilité à de l’eau fraîche, ainsi que l’intégration de ce risque dans le document unique d’évaluation des risques professionnels (DUERP).
Lors de sa réunion du 25 juin 2025, le conseil d’administration de l’Unédic a acté une revalorisation de 0,5 % des allocations d’assurance chômage, applicable depuis le 1er juillet 2025. Cette décision a donné lieu à la publication, le même jour, des circulaires n° 2025-06 et n° 2025-07, précisant les modalités de mise en œuvre de cette revalorisation en métropole et à Mayotte. Les ajustements concernent notamment le salaire journalier de référence (SJR) ainsi que les paramètres fixes entrant dans le calcul des allocations journalières.
Depuis le 2 juillet 2025, la protection renforcée contre les mesures discriminatoires, jusque-là réservée aux femmes enceintes ou engagées dans un parcours de PMA, est étendue aux salariés hommes concernés par un parcours de procréation médicalement assistée ou une procédure d’adoption (C. trav., art. L. 1225-3-1).
Le donneur d'ordre peut invoquer, à l'appui de sa contestation de la solidarité financière, les irrégularités entachant le redressement opéré à l'encontre de son cocontractant du chef du travail dissimulé. Il ne peut, en revanche, opposer à l’URSSAF celles entachant la mise en demeure délivrée à son sous-traitant, dès lors qu’elle constitue la décision de recouvrement à l'encontre de celui-ci. Ainsi, l'éventuelle irrégularité de cet acte ne constitue pas une exception commune que le donneur d'ordre peut opposer à l'URSSAF.
La déclaration inexacte de l’assurée, qui a fait preuve de réticence en n’informant pas son assureur de sa cessation d’activité, ne suffit pas à prononcer la nullité du contrat d’assurance, même si elle a changé l’objet du risque. Il convient de rechercher l’intention de l’assuré de tromper l’assureur sur la nature du risque.
Le chapitre 5 relatif aux fait générateurs des cotisations et contributions sociales de la rubrique « Assiette générale » du BOSS a été mis à jour pour préciser les règles applicables en matière de cotisations et contributions sociales. Ce chapitre fait l’objet d’une phase d'adaptation à compter du 1er juillet 2025 et ne sera pas opposable avant le 1er janvier 2027.
L’ACPR et l’ARPP ont conclu une convention de partenariat prévoyant un échange d’informations issues de leurs missions de surveillance publicitaire, une collaboration dans l’élaboration de bonnes pratiques dans les secteurs bancaire et assurantiel, ainsi qu’une action conjointe d’information à destination des professionnels sur la réglementation applicable et les recommandations en matière de publicité.
Le CCSF a publié le rapport annuel de l’OPEF qui a notamment pour vocation d’aider à mieux comprendre les produits d’épargne financière (l’assurance-vie, les contrats de capitalisation et les plans d’épargne retraite assurantiel), leurs performances, leurs frais et les facteurs qui les influencent.
En savoir plus
L’emploi de l’expression « tel que » dans une clause d’exclusion a pour conséquence de la rendre imprécise et ne permet pas à l’assuré de connaître l’étendue de ses garanties. La clause n’est alors ni formelle ni limitée.
Constatant que « la définition de l’accident dans les contrats d’assurance diffère généralement de celle du langage courant. Cela suscite depuis toujours l’incompréhension des assurés et est donc à l’origine de nombreux contentieux. » le Médiateur de l’assurance consacré son cahier n°6 à la notion d’« accident » en assurance de personnes.
Saisi pour se prononcer sur la loi contre toutes les fraudes aux aides publiques, le Conseil constitutionnel valide le passage à l’opt-in en matière de démarchage. Dès le 11 août 2026 il faudra préalablement à tout démarchage téléphonique obtenir le consentement de la personne démarchée. En dehors d’appels relatifs à un contrat en cours il ne sera plus possible de contacter un particulier sans son consentement préalable explicite. L’auteur du démarchage devra être en mesure de prouver ce consentement.
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