Canicule : soyons vigilants en entreprise !

25/06/2019
Alors que l’alerte canicule a été lancée dans presque tous les départements en France, Chloé Bouchez et Pauline Dupont reviennent sur les obligations qui incombent aux employeurs et les bons comportements à adopter afin de préserver la santé des travailleurs.

Le Code du travail comporte peu de dispositions particulières prescrivant aux entreprises des mesures spécifiques à prendre en cas de forte hausse des températures (sauf pour les sociétés du BTP pour lesquelles les obligations sont plus importantes).

Toutefois, du fait de leur obligation de sécurité et des dispositions générales du Code du travail relatives à la protection physique et mentale des salariés et l’obligation d’adaptation de ces mesures de protection, les employeurs doivent faire l’objet d’une vigilance particulière en cas de situation de canicule afin de protéger les salariés des risques pour leur sécurité.

 

  • Quelles sont les mesures à prendre avant et pendant un épisode caniculaire ?

L’employeur doit mettre en place des mesures de prévention, permettant de limiter le ressenti des fortes chaleurs :

Surveiller la température des locaux

Selon le Ministère du travail, il convient de vérifier notamment les adaptations techniques (aération, mise en place de stores), assurer le renouvellement de l’air afin d’éviter des odeurs et les condensations (C trav R. 4222-1 du Code du travail).

La Caisse Nationale de l’Assurance Maladie des Travailleurs Salariés recommande d’évacuer les salariés travaillant dans des bureaux au-delà d’une température ambiante de 34 °C.

Anticiper l’installation d’un système de climatisation. A défaut, des ventilateurs et des brumisateurs devront être mis à disposition des salariés

– Mettre à disposition des travailleurs de l’eau potable et fraîche (3 litres d’eau par personne et par jour sur les chantiers du BTP (C., trav., R. 4225-2 ; C. trav., R. 4534-13)). Avec la canicule, il est conseillé d’anticiper les volumes d’eau à mettre à disposition.

Informer les salariés des risques liés à la canicule, des signes et symptômes d’une insolation ou d’un coup de chaleur, par le biais par exemple d’une note d’information diffusée sur l’intranet de l’entreprise ou le panneau d’affichage de la société.

Sensibiliser l’ensemble des salariés sur les bons gestes à adopter (s’hydrater régulièrement, se protéger du soleil pour ceux qui travaillent en extérieur, utiliser les ventilateurs et brumisateurs mis à disposition par l’employeur). Les salariés, notamment les managers, devront rester attentifs à l’état de santé des collaborateurs de leur équipe et connaitre la procédure à suivre si un salarié est victime d’un coup de chaleur.

 

  • Comment gérer l’organisation du travail pendant la canicule ?

Strictement, le Code du travail n’impose aucune obligation d’adapter l’organisation du travail en raison de forte chaleur. Toutefois, les mesures prises pour faciliter le travail des collaborateurs permettront de justifier des démarches effectuées par l’employeur dans le cadre de son obligation de sécurité,

Voici quelques exemples de mesures qui pourraient être envisagées :

- une adaptation des horaires de travail et du rythme de travail (réduction des cadences, début d’activité plus matinale, pauses supplémentaires), si l’activité de la société le permet ;

- Favoriser le télétravail pour les salariés qui le souhaitent et qui disposent de l’équipement nécessaire ;

- Être plus flexible sur la prise des journées de RTT ;

- Utiliser des aides mécaniques à la manutention.

 

  • Un salarié peut-il être autorisé à ne pas porter sa tenue de travail ?

En raison des fortes chaleurs et si la température des locaux est élevée, il est possible de permettre à certains salariés, qui doivent respecter un code vestimentaire, d’adapter leur tenue afin de travailler dans de meilleures conditions.

En revanche, pour les salariés qui portent des équipements de nature à préserver l’hygiène et la sécurité (notamment dans les secteurs de la restauration, secteur médical, sécurité, secteur du BTP), les salariés devront continuer à porter leur tenue de travail, à défaut de quoi la responsabilité de l’employeur pourra être engagée en cas d’accident du travail.

Enfin, si le Ministère du travail préconise le port de « vêtement léger », ceci n’exonère pas les salariés de leur obligation de venir travailler en tenue correcte, notamment pour ceux qui sont en contact avec des personnes extérieures à l’entreprise.

 

  • Quels sont les risques si l’employeur ne respecte pas ces préconisations ?

Droit de retrait

Si la chaleur est trop élevée, les salariés pourront exercer le droit de retrait. Ils devront alors informer leur employeur et rester à sa disposition.

A cet égard, l’INRS a indiqué qu’au-delà de 30 °C pour une activité sédentaire et 28 °C pour une activité physique, la chaleur peut constituer un risque pour les salariés.

Bien entendu, une situation de canicule ne constitue pas en elle-même une situation de recours automatique et légitime au droit de retrait (Circ. DRT n° 2006/14, 19 juill. 2006).

L’exercice du droit de retrait devra être conditionné à l’existence de signe avant-coureur présentant un risque pour la santé (malaise, défectuosité des systèmes de ventilation…).

Si ces conditions de ne sont pas réunies ou justifiées, une retenue sur salaire proportionnelle à l’arrêt de travail pourra être opérée.

Dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de sécurité

Si des accidents de travail sont liés à la canicule, l’employeur pourra voir sa responsabilité engagée pour violation de son obligation de sécurité.

Suspension de l’activité de la société

Enfin, les instances représentatives du personnel pourraient se saisir de la question et alerter l’inspection du travail sur ce point qui pourrait, si elle constate une infraction aux règles de sécurité, ordonner l’arrêt temporaire de l’activité de la société.

 

  • La canicule, et après ?

Compte tenu du changement climatique annoncé depuis plusieurs années, les épisodes caniculaires auront sans doute vocation à se multiplier au cours des prochaines années.

L’employeur devra donc se mettre en ordre de marche afin de faire face rapidement à ces fortes chaleurs. Différentes mesures devront donc être prises dans les prochains mois, à savoir :

-S’assurer régulièrement du bon fonctionnement des ventilations et des systèmes d’aération ;

- Le cas échéant, établir des plans d’action avec des mesures correctives ;

- Informer et consulter le CSE sur les adaptations mises en place ou envisagées ;

- Associer les services de santé au travail à la prévention des risques et à l’information des salariés ;

- Intégrer ce risque dans le document unique d’évaluation des risques professionnels (C trav. Art R. 4121-1).

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